De 1911 à la cuisine de Jean-Maurice, les chapelets et les syndicats

Samedi 9 septembre, nous sommes dans la cuisine de Jean-Maurice et qui nous raconte l’activité syndicale d’une petite usine de campagne dans les années 90. Ça pourrait être une histoire assez commune, celle d’un représentant du personnel qui se bat pour que les autres gagnent un peu plus à la fin du mois ou aient un peu plus de droits.

Mais, en Livradois-Forez, celle-ci n’est pas tout à fait commune d’histoire. Parce que les autres en l’occurrence, ce sont toutes des femmes et qu’elles sont travailleuses à domicile, monteuses de chapelet. Avec leur pince, les mêmes pinces que celles de leurs grands-mères, dans les années 90 elles travaillaient de chez elles, perpétuant le cycle des travailleuses à domicile du territoire, du chapelet ou de la dentelle.

Elles travaillaient sans aucune conscience de groupe ni de classe, et sans les droits qu’avaient les autres travailleurs de l’entreprise qui les employaient. Elles travaillaient enfin seules et étaient rémunérées selon une grille de rémunération qui, selon Jean-Maurice, « dataient d’Erode ».

Jean-Maurice nous raconte son histoire, celle d’un délégué syndical d’une petite usine de campagne qui demande, innocemment ou presque, dans une discussion avec la direction, ce que les travailleuses à domicile représentent en termes d’équivalent temps plein. En face de lui, pas de réponse et un malaise. De là, il comprend qu’il y a un lièvre à lever, et va aller à la rencontre de ces femmes isolées. Il nous raconte la réalité de ces travailleuses infatigables et exploitées.

Il nous raconte aussi la fin d’une histoire initiée en 1911 par les grandes grèves des travailleuses du chapelet de Job et Valcivières, puis par celles d’Ambert l’année suivante que Jean Anglade relate dans La Bonne rosée. En voici les premiers mots :

[1912]

Au printemps éclata une grève implacable parmi les chapeletières de la région ambertoise. Sans discours, sans organisation, sans C.G.T., ces pauvres bergères donnèrent aux polisseuses et émouleuses – grandes pâtissières en pain bénit et mangeuses d’hosties saintes – et même à leurs hommes, camarades syndiqués, une belle leçon de combativité et de socialisme.

Rencontrez cette histoire et toutes les autres lors du Bus des Mémoires en Livradois-Forez, en attendant, nous continuons notre exploration.